Un poil long et compliqué, mais même les crétins comprendront...
Les vrais raisons de la hausse du pétrole.....(jamais évoquées dans les
médias) :
En résumé : la hausse n'est pas la conséquence d'une pénurie de pétrole ou
d'une forte demande des pays émergents. C'est les banques qui font monter
les cours en investissant massivement dans des produits financiers à fort
effet de levier, indexés sur le cours du baril. Les banques compensent
ainsi leurs pertes dans le crédit immobilier à risque. On est dans un
phénomène de bulle spéculative et les cours devraient baisser voire baisser
très fortement ....
Géopolitique de l'énergie
Le cours du brut se moque de la réalité des carburants
Par F William Engdahl
AsiaTimesOnline, publié le 24 mai 2008
article original : "Oil price mocks fuel realities"
Alors que les entreprises et les consommateurs évaluent ce que le brut à
plus de 130 dollars le baril implique pour eux, il doivent garder en tête
qu'au moins 60% de ce prix provient de la spéculation non-régulée sur les
marchés à terme. Cette spéculation est orchestrée par des fonds
spéculatifs, des banques et des groupes financiers, qui utilisent le London
ICE Futures, le marché à terme du New York Nymex et les échanges
interbancaires non contrôlés ou hors cote...
Les règles américaines sur les marges, fixées par la Commission
gouvernementale des Echanges des Contrats à Terme sur les Matières
Premières, permettent aux spéculateurs d'acheter des contrats à terme sur
le brut au Nymex, en payant seulement 6% de la valeur du contrat. Au prix
actuel d'environ 130 dollars le baril, cela signifie que l'opérateur sur
ces contrats à terme n'a besoin de verser qu'environ 8 dollars pour chaque
baril. Il emprunte les 120 dollars restants.
Cet "effet de levier" extrême, de 16 contre un, contribue à conduire les
prix vers des niveaux follement irréalistes et efface les pertes des
banques, occasionnées par les subprime et autres désastres, aux dépens de
la population d'ensemble.
Le bobard du "pic de pétrole" ? c'est à dire l'argument selon lequel la
production de pétrole a atteint le point où plus de la moitié des réserves
a été utilisée et où le monde est sur la pente descendante du pétrole bon
marché et des quantités abondantes ? a permis à cette escroquerie coûteuse
de se poursuivre depuis l'invasion de l'Irak en 2003, avec l'aide des
banques-clés, des opérateurs pétroliers et des majors pétrolières.
Washington essaye de faire porter le chapeau, comme toujours, aux
producteurs arabes et à l'OPEP. Le problème n'est pas une offre de brut
trop faible. En fait, le monde est actuellement en suroffre. Pourtant, le
prix du baril grimpe toujours plus haut sans relâche. Pourquoi ? On trouve
la réponse dans la politique clairement délibérée du gouvernement des
Etats-Unis qui permet les manipulations effrénées sur le prix du pétrole.
La demande mondiale de pétrole est plate, les prix s'envolent
Le stratège en chef sur ce marché de l'une des premières banques mondiales
de l'industrie pétrolière, David Kelly, de JP Morgan Funds, a admis
récemment au Washington Post quelque chose qui en dit long : "L'une des
choses que je pense est qu'il est très important de réaliser que la
croissance de la consommation mondiale de pétrole n'est pas si forte".
L'une des histoires utilisées pour soutenir les spéculateurs sur les
contrats pétroliers à terme est l'affirmation que la demande chinoise de
pétrole importé explose hors de tout contrôle, conduisant à des pénuries
dans l'équilibre entre l'offre et la demande. Pourtant, les faits ne
soutiennent pas la thèse de la demande chinoise.
L'EIA [l'Agence pour l'Information sur l'Energie] du gouvernement américain
a conclu dans son tout dernier rapport "Perspectives Energétiques à Court
Terme" que l'on s'attend à ce que la demande de pétrole des Etats-Unis
décline cette année de 190.000 barils par jour. Ceci est principalement dû
à la récession économique qui se creuse.
Selon l'EIA, on s'attend à ce que la consommation chinoise, loin
d'exploser, s'accroisse cette année de seulement 400.000 barils par jours.
C'est difficilement la "brusque montée de la demande" attribuée à la Chine
dans les médias [qui justifie l'envolée des cours du brut]. L'année
dernière, la Chine a importé 3,2 millions de barils par jour et sa
consommation estimée était autour d'un total de 7 millions de barils/jour.
Par contraste, les Etats-Unis consomment aux alentours de 20,7 millions de
barils/jour.
Cela veut dire que la nation la plus consommatrice de pétrole, les
Etats-Unis, connaissent une baisse significative de la demande. La Chine,
qui consomme seulement un tiers de ce que consomment les Etats-Unis, ne
connaîtra qu'une augmentation mineure de la demande d'importation, à
comparer avec la production quotidienne mondiale de pétrole de quelques 84
millions de barils [actuellement], moins d'un demi-pour-cent de la demande
totale.
Les prévisions de l'OPEP sur la croissance de la demande mondiale de
pétrole sont inchangées à 1,2 millions de barils/jour, alors que le
ralentissement de la croissance économique dans le monde industrialisé est
compensé par une légère croissance de la consommation dans les pays en
développement. L'OPEP prédit que la demande mondiale de pétrole en 2008
sera en moyenne de 67 millions de barils/jour, largement inchangée selon
son estimation précédente. On prévoit que la demande de la Chine, du
Moyen-Orient, de l'Inde et de l'Amérique Latine se renforce, mais la
demande de l'Union Européenne et de l'Amérique du Nord sera plus faible.
Les plus gros consommateurs de pétrole au monde sont donc confrontés à une
baisse brutale de la consommation, qui s'aggravera au fur et mesure que les
effets économiques liés au logement et à la crise de la titrisation
américaine dans les désendettements financiers se fera sentir.
Sur des marchés normaux et transparents le cours du brut devrait plutôt
baisser qu'augmenter. Aucune crise de l'offre ne justifie la façon dont le
cours du brut est fixé aujourd'hui.
De nouveaux champs pétroliers importants entrent en service
Non seulement il n'y a pas de crise de l'offre pour justifier une telle
bulle dans le cours du brut, mais plusieurs champs pétroliers géants
doivent commencer à produire courant 2008, augmentant un peu plus l'offre.
Le plus gros producteur de pétrole du monde, l'Arabie Saoudite, finalise
des projets pour accroître son activité de forage d'un tiers et augmenter
ses investissements de 40%. Le projet de Saudi Aramco, qui court de 2009 à
2013, devrait être approuvé ce mois-ci par le conseil d'administration de
cette société et le ministère du pétrole. Le royaume saoudien est en plein
milieu d'un projet à 50 milliards de dollars d'expansion de sa production
pétrolière pour satisfaire la demande croissante en Asie et sur les autres
marchés émergents, et il est prévu qu'il accroîtra sa capacité de pompage à
un total de 12,5 millions de barils/jour d'ici l'année prochaine, une
augmentation d'environ 11% de la capacité actuelle, qui est de 11,3
millions de barils/jour.
En avril de cette année, le champ pétrolier Khoursaniyah en Arabie Saoudite
a commencé le pompage et fournira bientôt 500.000 barils supplémentaires
par jour de brut saoudien léger de haute qualité. De plus, le développement
du champ pétrolier Khourais de ce pays, le plus gros projet de Saudi
Aramco, propulsera la capacité de production des champs pétroliers
saoudiens de 11,3 à 12,5 millions de barils/jour de brut léger arabique de
haute qualité, accroissant ainsi la capacité d'exportation de l'Arabie
Saoudite.
Le brésilien Petrobras est en dans les premières phases d'exploitation des
réserves pétrolières offshore récemment confirmées dans son champ
pétrolifère de Tupi, qui pourrait être aussi fabuleux, voire plus, que la
Mer du Nord. Petrobras dit que le nouveau champ Tupi, ultra-profond,
pourrait contenir jusqu'à 8 milliards de barils de brut léger récupérables.
Lorsqu'il sera en service dans quelques années on s'attend à ce qu'il place
le Brésil parmi les 10 premiers producteurs de pétrole du monde, entre le
Nigeria et le Venezuela.
Aux Etats-Unis, aux côtés de rumeurs selon lesquelles les grosses
compagnies pétrolières sont restées assises sur de vastes nouvelles
réserves en Alaska, par crainte que les prix de ces dernières années ne
plongent à cause d'une surproduction, le US Geological Survey [l'Agence
américaine des Etudes Géologiques] (USGS) a récemment sorti un rapport qui
confirmait de nouvelles réserves pétrolières dans une région qui s'appelle
les Bakken, qui s'étendent sur le Dakota du Nord, le Montana et le sud-est
du Saskatchewan<.i>. L'USGS estime qu'il y a jusqu'à 3,65 milliards de
barils de pétrole dans les Bakken.
Il y a aussi les quelques confirmations des nouvelles réserves importantes
de pétrole qui ne demandent qu'à être exploitées en Irak, où les Quatre
Majors anglo-américaines salivent pour mettre la main sur les champs
inexplorés. On pense que ceux-ci recèlent des réserves juste au deuxième
rang derrière l'Arabie Saoudite. Le reste du monde est encore à explorer. A
un prix au-dessus de 60% dollars le baril, les nouveaux potentiels immenses
deviennent économiquement viables. Le problème essentiel auquel sont
confrontées les Majors n'est pas de trouver un remplacement au pétrole mais
de garder secrètes les découvertes de pétrole, afin de maintenir les prix
actuels à un niveau exorbitant. Là, elles sont aidées par les banques de
Wall Street et les deux principales bourses au pétrole ? le Nymex et ICE
Futures de London-Atlanta's ICE.
Alors, pourquoi les prix continuent-ils d'augmenter ?
Il y a une preuve de plus en plus évidente que la récente bulle spéculative
sur le pétrole, qui a suivi une asymptote depuis janvier, est sur le point
d'éclater. Fin avril, à Dallas, au Texas, l'Association Américaine des
Géologues Pétroliers a tenu sa conférence annuelle. Elle réunissait des
dirigeants des Majors et des géologues. Selon l'un des participants, les
patrons des majors, bien documentés, sont arrivés au consensus que "le prix
du pétrole baissera bientôt spectaculairement et la croissance des prix à
long terme se fera dans le gaz naturel".
Juste quelques jours plus tôt, Lehman Brothers, une banque d'investissement
de Wall Street, a dit que la récente bulle pétrolière touchait à sa fin.
Michael Waldron, le stratège pétrolier en chef de cette banque, a été cité
dans le Daily Telegraph britannique, le 24 avril. Voici ce qu'il a dit :
"L'offre de pétrole dépasse la croissance de la demande. Les stocks se sont
accumulés depuis le début de l'année".
Aux Etats-Unis, selon le rapport mensuel de l'EIA sur les stocks, sorti le
7 mai, les stocks journaliers de pétrole ont grimpé depuis janvier de
presque 12 millions de barils en avril, pour atteindre près de 33 millions
de barils. En même temps, le rapport du 7 mai sur l'essence aux Etats-Unis,
publié par MasterCard, a montré que la demande d'essence avait chuté de
5,8%. Et les raffineurs réduisent de façon spectaculaire les rythmes du
raffinage pour s'ajuster à la demande d'essence en baisse. Les raffineries
tournent actuellement à 85% de leur capacité, en baisse par rapport aux 89%
de l'année dernière, dans une saison où la production est normalement de
95%. Les raffineurs essayent aujourd'hui clairement de tirer les stocks
d'essence vers le bas pour faire monter le prix de l'essence. "C'est
l'économie, idiot !", pour paraphraser le trait d'esprit tristement célèbre
que Bill Clinton a fait papa Bush. Cela s'appelle la récession économique.
Le rapport du 8 mai d'Oil Movements, une société britannique qui suit la
progression des cargaisons de pétrole dans le monde entier, montre que le
pétrole en transit en haute mer est aussi assez fort. Pratiquement toutes
les catégories de cargaisons sont plus importantes que l'année dernière. Ce
rapport fait remarquer, "En Occident, une grande partie de toute
accumulation de pétrole, cette année, s'est produite au large, hors de la
vue". Certains initiés de cette industrie disent que l'industrie mondiale
du pétrole, des activités et des stocks des Quatre Majors au véritable état
des bateaux-citernes, au stockage et au levage des stocks, est l'industrie
la plus secrète au monde, à l'exception possible du commerce des
stupéfiants.
Goldman Sachs est encore une fois au centre
Le prix du pétrole aujourd'hui, contrairement à il y a 20 ans, est
déterminé à huis clos dans les salles de marché des institutions
financières géantes, comme Goldman Sachs, Morgan Stanley, JP Morgan Chase,
Citigroup, Deutsche Bank ou UBS. La bourse-clé dans ce jeu est le London
ICE Futures Exchange (anciennement l'International Petroleum Exchange ? la
Bourse Internationale du Pétrole). ICE Futures est une filiale à 100% d'
Atlanta Georgia International Commodities Exchange. ICE a été fondé à
Atlanta en partie par Goldman Sachs, qui se trouve être aussi l'indice des
prix des matières premières le plus utilisé au monde, le GSCI, qui est
sur-lesté par le prix du pétrole.
Ainsi que je l'avais fait remarquer dans mon article précédent, ICE a été
le centre d'intérêt d'une enquête parlementaire récente. Cette société a
été citée à la fois dans le rapport du 27 juin 2006 de la sous-commission
permanente d'enquêtes du Sénat et dans les auditions de décembre 2007 de la
Commission sur l'Energie et le Commerce de la Chambre des Représentants,
qui a enquêté sur commerce non régulé des contrats énergétiques à terme.
Ces deux études ont conclu que la progression du prix du pétrole à 128
dollars le baril et plus est alimentée par les milliards de dollars des
contrats à termes sur le pétrole et le gaz qui sont placés sur l'ICE. Au
moyen d'une exception bien pratique de la régulation, accordée en janvier
2006 par l'administration de George W Bush, les échanges d'ICE Futures sur
les contrats énergétiques à terme américains ne sont pas régulés par la
Commission d'Echange des Contrats à Terme sur les Matières Premières
(CFTC), même si les contrats pétroliers américains échangés par
l'intermédiaire d'ICE Futures le sont dans des filiales d'ICE aux
Etats-Unis. Et, à la requête d'Enron, le CFTC a exempté en 2000 les
échanges de gré à gré de contrats pétroliers à terme.
Il n'est donc pas surprenant de voir dans un rapport que Reuters a sorti le
6 mai que Goldman Sachs annonce que le pétrole pourrait en fait être au
bord d'un nouveau cours "super élevé", pouvant conduire le prix du baril
jusqu'à 200 dollars dans les six à 24 prochains mois. Ce gros titre "200
dollars le baril !" a fait la une des journaux pendant les deux jours qui
ont suivi. Combien de lemmings incrédules ont-ils suivi cette annonce en
plaçant leurs paris ?
Arjun Murti, le stratège énergétique de Goldman Sachs, a accusé ce qu'il
appelle la demande "féroce" (sic) de la Chine et du Moyen-Orient, combinée
avec son affirmation que le Moyen-Orient est proche de sa capacité maximum
de production. La mythologie du "Pic de Pétrole" a une fois encore aidé
Wall Street. Le degré de ce battage non fondé rappelle l'un des battages
intéressés de Wall Street en 1999-2000 autour des actions des dot.com ou
d'Enron.
En 2001, juste avant le crack des dot.com au NASDAQ, quelques firmes de
Wall Street poussaient auprès d'un public crédule les ventes d'actions de
sociétés, où leurs filiales bancaires avaient des intérêts financiers. En
somme, comme cela est sorti des enquêtes parlementaires, des sociétés qui
ont un intérêt particulier dans une certaine issue financière se sont
servies des médias pour se remplir les poches et celles de leurs sociétés,
sur le dos du public.
Il serait intéressant que le Congrès assigne Goldman Sachs et une poignée
d'autres acteurs majeurs à présenter les registres de leurs contrats
énergétiques à terme pour voir s'ils sont investis dans le but de
bénéficier d'une augmentation supplémentaire du pétrole à 200 dollars. Sans
oublier qu'un fonds spéculatif ou une banque peut acheter des contrats
pétroliers à terme avec un effet de levier de 16 contre un.
On nous assène une série interminable d'arguments plausibles pour justifier
le cours élevé du brut : une "prime pour le risque terroriste", une
augmentation "féroce" de la demande de la Chine et de l'Inde, les troubles
dans la région pétrolifère du Nigeria, des pipelines qui sautent en Irak,
une possible guerre avec l'Iran ? et, par-dessus tout, le battage sur le
pic de pétrole. Le spéculateur pétrolier T Boone Pickens aurait encaissé un
profit énorme sur les contrats pétroliers à terme et il soutient, ce qui
est bien pratique, que le monde se trouve au sommet du "pic de pétrole".
Tout comme le banquier d'investissements de Houston et ami du
Vice-président Dick Cheney, Matt Simmons.
Ainsi que cela est noté dans le rapport sénatorial de juin 2006, Le Rôle de
la Spéculation de Marché dans la Croissance des Prix du Pétrole et du Gaz,
"Il y a quelques gérants de fonds spéculatifs qui sont passés maîtres pour
savoir comment exploiter les théories du pic de pétrole et le sujet
bouillant de l'offre et de la demande. Leurs prédictions assurées selon
lesquelles les cours à venir connaîtront une ascension désastreuse ne font
qu'alimenter un peu plus le feu haussier, dans une sorte de prédiction qui
s'accomplit elle-même".
Un Congrès Démocrate agira-t-il en année électorale pour changer les
marchés des contrats pétroliers à termes, minutieusement élaborés de façon
opaque, et risquer ainsi de faire éclater la bulle ? Le 12 mai, la
Commission sur l'Energie et le Commerce de la Chambre des Représentants a
déclaré qu'elle examinerait cette question en juin.
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